une vie de commerçant


Marguerite Thibert a vécu pendant 92 ans à Tournus, c’est dire si elle a bien connu la vie de la ville…

Sur cette photo, on peut la reconnaître au premier plan, dans le cours de gymnastique de Melle Moscol en 1930.

 

LA  VIE  D’UN  COMMERCANT  AVANT  LA 2 EME GUERRE MONDIALE

Le lundi, les commerçants ne fermaient pas leurs magasins qu’ils ouvraient tôt le matin vers 8 heures et très souvent pendant le déjeuner. La fermeture en était assurée le soir vers 20 – 21 heures.

Le commerce de mes parents était intitulé Thibert – Baucheron  Marchand Tailleur successeurs de Thibert – Ducloux. Le dimanche matin, les représentants y étaient accueillis ainsi que parfois quelques clients.

Pour les mariages, la coutume voulait que la famille du marié offrît la robe à la mariée; chacune des deux familles était habillée par un fournisseur de son choix qui avait ainsi à vendre une vingtaine de pièces : les hommes portaient alors un complet avec un gilet, les plus jeunes étant habillés « en confection », vêtements fabriqués en série à Lyon, Paris, etc… Le fournisseur offrait un cadeau au marié, une belle chemise avec une cravate, soit une régate, soit un petit nœud.

Une bonne partie des vêtements étaient cousus à la main dans l’atelier de mon père, l’emploi des machines à coudre de marque Singer étant réservé aux coutures. La soie Chardonnet achetée à Besançon, et le fil d’excellente qualité assuraient de solides finitions. Les 5 ou 6 personnes de l’atelier de mon père apportaient un soin tout particulier à ce qui était fait et prenaient le temps nécessaire pour la réalisation d’un beau travail. En dehors d’ un ou deux apprentis, les « pompières » s’occupaient des pantalons, les « giletières » avaient leurs spécialités, tout comme les « monteuses »

Mon frère Jean a pu fêter le centenaire du commerce de mes parents et même grands parents fondé en 1873 , ce qui est assez exceptionnel. Mon grand – père avait une petite échoppe dans le quartier de la Madeleine.

Mon père, qui ne voulait absolument pas être tailleur, avait cependant fait une école spéciale à Paris d’où il était sorti diplômé (Ladevèze).

Mon grand-père et mon père taillaient sur une grande table de coupe avec de grands ciseaux et des équerres, en suivant le tracé fait auparavant à la craie. Ensuite une ouvrière « montait » les pièces, ce qui était un vrai travail de spécialiste : il n’est pas donné à tout le monde de faire un revers ou un col impeccables.

Mon frère n’était pas tailleur lui-même, mais il faisait faire les vêtements sur mesure à Lyon, ce qui n’a rien à voir avec le prêt-à-porter actuel.

Il faut insister particulièrement sur les relations qui existaient à cette époque entre commerçants : ils ne se recevaient pas les uns les autres, mais ils se fréquentaient quotidiennement. En face du magasin de mes parents, se trouvait la boucherie Bériaud. La coutume voulait que, pour le jour de l’an, M. Bériaud traversât la rue pour offrir à maman un magnifique saucisson truffé, avec des pistaches, et maman avait préparé pour lui une cravate; ensuite, ils s’embrassaient en échangeant leurs vœux.

Lorsque quelqu’un se trouvait dans l’ennui, chacun venait prendre des nouvelles et proposer ses services.

 

ci-dessus, la famille Thibert lors d’une fête des fleurs en 1930. Marguerite est dans la calèche.

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